Depuis plusieurs années, la France a engagé un
vaste chantier de rénovation énergétique du parc immobilier.
Les copropriétés sont en première ligne, car elles représentent une part importante des logements anciens et énergivores. Avec la loi Climat et Résilience du 22 août 2021, le législateur a introduit une obligation progressive d’élaborer un plan pluriannuel de travaux et de réaliser un diagnostic énergétique collectif.
Dans un premier temps, les grandes copropriétés de plus de 200 lots avaient été concernées dès 2023. L’année suivante, ce sont les copropriétés de taille intermédiaire, celles qui comptent entre 50 et 200 lots, qui ont dû se mettre en conformité. Et à partir du 1er janvier 2025, le dispositif s’étend désormais aux plus petites copropriétés, celles qui comptent moins de 50 lots. Autrement dit, à cette date, toutes les copropriétés sans exception devront disposer d’un plan structuré de rénovation, ce qui marque un tournant majeur dans la politique énergétique du logement en France.
Des obligations précises : diagnostics et planification
La réforme ne se limite pas à une simple déclaration d’intention. Elle impose deux étapes incontournables. D’abord, le diagnostic énergétique collectif, réalisé par un professionnel certifié, doit permettre d’identifier la situation réelle de l’immeuble. Ce document met en évidence les points faibles du bâti, qu’il s’agisse des déperditions thermiques au niveau des façades, des problèmes d’étanchéité des toitures ou encore des performances insuffisantes du chauffage collectif.
Ensuite, sur la base de ce constat, le syndic a la responsabilité de proposer un plan pluriannuel de travaux. Ce plan doit s’étendre sur une durée de dix ans et être soumis au vote de l’assemblée générale des copropriétaires. Il recense les interventions à réaliser, leur ordre de priorité, leur coût estimatif et les financements possibles. En parallèle, le fonds de travaux, instauré par la loi Alur, joue un rôle central dans le financement de ces projets. Ce fonds doit être alimenté de manière régulière et représente un gage de sérieux dans la préparation des investissements à venir.
L’épreuve du vote en assemblée générale
Si la nécessité de rénover est largement partagée sur le plan politique et environnemental, la réalité du terrain est bien plus complexe. Toute décision de travaux doit passer par l’assemblée générale des copropriétaires, où les débats sont souvent vifs. La règle est celle de la majorité absolue prévue par l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965. Toutefois, afin d’éviter des blocages trop fréquents, une passerelle a été instaurée : lorsque le projet obtient au moins un tiers des voix, il peut être soumis une seconde fois au vote, cette fois à la majorité simple. Cette procédure assouplie permet d’accélérer certaines décisions, mais elle n’efface pas les résistances.
Ces résistances tiennent d’abord aux disparités de situation entre copropriétaires. Certains, souvent âgés ou disposant de revenus modestes, peinent à envisager de lourdes dépenses. D’autres, bailleurs notamment, craignent de ne pas retrouver leur investissement dans un marché locatif parfois contraint. Les assemblées générales deviennent alors le théâtre de négociations, de reports ou de compromis difficiles. Un exemple frappant, relaté par Le Monde en avril 2024, montre qu’un immeuble de Montpellier a mis près de dix ans avant de parvenir à lancer un projet de rénovation, tant les discussions s’étaient prolongées d’année en année.
Le casse-tête du financement
Le principal obstacle reste la question du financement. Les rénovations énergétiques globales représentent des sommes considérables, souvent comprises entre vingt et quarante mille euros par logement. Même si la volonté existe, il n’est pas toujours possible pour tous les copropriétaires de mobiliser de telles sommes en quelques années.
Pour répondre à ce défi, plusieurs aides publiques ont été mises en place. MaPrimeRénov’ Copropriété est sans doute la plus connue. Elle peut couvrir jusqu’à 25 % du montant des travaux, mais elle impose d’atteindre un gain énergétique d’au moins 35 %, ce qui suppose une rénovation ambitieuse. L’éco-prêt à taux zéro, ou éco-PTZ, constitue un autre outil précieux : il permet à chaque copropriétaire d’emprunter jusqu’à 30 000 euros sans payer d’intérêts, une solution qui facilite le passage à l’acte. À cela s’ajoutent les certificats d’économie d’énergie, financés par les fournisseurs d’énergie, qui viennent réduire le reste à charge. Enfin, certaines collectivités locales proposent des exonérations temporaires de taxe foncière pour encourager la rénovation.
Toutefois, l’accès à ces aides n’est pas automatique. Les démarches administratives sont lourdes, et leur réussite passe souvent par le recours à un assistant à maîtrise d’ouvrage. Cette figure, désormais obligatoire pour certaines subventions, accompagne le syndicat dans la constitution des dossiers, le choix des entreprises et le suivi du projet.
Les résistances persistantes
Malgré ces soutiens, de nombreuses copropriétés peinent encore à avancer. La fracture financière entre copropriétaires reste un frein majeur : dans un même immeuble, les écarts de revenus créent des tensions et peuvent bloquer un vote. S’ajoute le scepticisme sur les bénéfices réels de la rénovation : certains doutent que les économies sur les factures d’énergie justifient un tel investissement. À cela s’ajoutent des difficultés de gouvernance, notamment lorsque le syndic n’a pas les compétences ou la volonté de porter le projet, ou lorsque le conseil syndical est divisé.
Même une fois les travaux votés, le chemin reste long. Il faut trouver des financements, lancer les appels d’offres, sélectionner les entreprises et composer avec des délais de chantier qui peuvent s’étirer sur plusieurs années. L’expérience montre que le temps qui sépare le vote initial du lancement effectif peut atteindre plusieurs exercices budgétaires, ce qui décourage parfois les copropriétaires.
Les risques de l’inaction
Ignorer ces obligations ou retarder indéfiniment les projets n’est pas sans conséquence. Les logements classés F ou G deviennent progressivement interdits à la location. Dès 2025, les pires passoires énergétiques, notées G+, ne pourront plus être mises sur le marché locatif. Les classes F seront à leur tour concernées en 2028. Ainsi, un copropriétaire bailleur qui ne suit pas le mouvement risque de se retrouver avec un logement vacant, faute de conformité.
La valeur patrimoniale du bien est également en jeu. Les notaires et les agences immobilières constatent déjà une décote significative pour les logements mal classés, parfois de 5 à 15 %. Cette perte de valeur s’aggrave encore lorsqu’une copropriété n’a pas engagé de démarche collective, car un acheteur potentiel anticipe des charges lourdes à venir ou redoute l’immobilisme de la collectivité.
Enfin, même si la loi n’impose pas aujourd’hui de sanction directe pour une copropriété qui ne respecte pas les obligations de planification, il est probable que le gouvernement renforce le contrôle dans les années à venir. On peut imaginer que certaines ventes ou certains financements seront conditionnés à la présentation d’un plan pluriannuel de travaux validé et à jour.
Vers une nouvelle dynamique en 2025 ?
L’extension de l’obligation aux petites copropriétés marque une étape décisive. Ces immeubles, souvent composés de dix à trente logements, sont particulièrement vulnérables car les coûts de travaux y sont moins mutualisés. Pourtant, ce sont aussi des bâtiments anciens, mal isolés et souvent énergivores, où les marges d’amélioration sont les plus fortes.
Les pouvoirs publics espèrent que l’obligation légale, conjuguée aux aides financières et à la pression du marché immobilier, permettra de créer une dynamique nouvelle. D’après l’ADEME, près de cinq millions de logements collectifs nécessitent encore une rénovation significative pour atteindre les objectifs climatiques de 2030. Le chantier est immense et les échéances se rapprochent.
Pour les copropriétaires, l’année 2025 doit être perçue comme un signal d’alarme, mais aussi comme une opportunité. S’engager dans un projet collectif, c’est certes mobiliser des fonds importants, mais c’est aussi préserver la valeur de son patrimoine, améliorer son confort et réduire durablement ses charges énergétiques.
Sources
- Le Monde, « Rénovation énergétique en copropriété : par où commencer ? », avril 2024.
- Le Monde, « Rénovation énergétique : à quelles aides ont droit les copropriétés en 2024 ? », avril 2024.
- Service-public.fr, « Plan pluriannuel de travaux en copropriété », 2025.
- Economie.gouv.fr, « MaPrimeRénov’ Copropriété », 2025.
- Legifrance, Loi Climat et Résilience du 22 août 2021.
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